derrière les barreaux + Ankh

Oops...

O O T D - Baisser la tête, oui oui. Soupirant, Cha se courba pour entrer dans la bagnole aux couleurs bleues et blanches, les poignets entravés par une paire de menottes qu'il ne jugeait nullement nécessaire. Il n'en revenait pas de s'être fait choper, avait trop pris la confiance après des années à filer entre les pattes des flics et s'était laissé aller. Ils avaient certainement repéré la fresque qu'il avait commencée avec Shin derrière une crèche dans le quartier nord et les avaient guetté, sachant qu'ils reviendraient terminer le travail. Heureusement que son pote n'était pas venu ce soir, sinon ils auraient été deux à devoir baisser la tête et garder le silence.

Confortablement installé à l'arrière du véhicule, il passa le trajet à regarder par la fenêtre, une mine ennuyée sur le visage. Il ne flippait pas, n'était pas paniqué à l'idée de s'être fait choper en flag. En fait, il était plutôt emmerdé à l'idée que les flics confisquent ses bombes de peinture qu'à celle de passer une nuit en cellule et d'avoir un casier judiciaire. Il ne prononça pas un mot jusqu'à ce que la bagnole se gare au commissariat, puis suivit docilement les agents jusqu'à un bureau où on le fit s'asseoir. Ennuyé, il répondit à leurs questions avec le moins de coopération possible et réclama son coup de fil pour appeler Adonis. Bon, le Moire était moyen chaud à l'idée de venir le chercher hein, mais Cha savait qu'il viendrait.

En attendant qu'il vienne payer sa caution, les flics mirent le peintre dans une cellule vide, avec seulement un banc pour accueillir son délicat fessier. Pas même un coussin pour reposer sa tête ou un rideau pour un peu d'intimité, les barreaux lui laissant voir les bureaux des agents qui bossaient sans se préoccuper de lui. Posé sur son banc, les jambes tendues devant lui et la tête appuyée contre un mur inconfortable. Il ne savait pas combien de temps il resterait là avant que Adonis ne vienne le chercher, mais il espérait que ça ne serait pas trop long. Évidemment, il se doutait qu'il aurait à payer son délit et qu'il lui faudrait s'excuser, etc, mais au moins il serait libre et pourrait retrouver le confort de son lit pour la nuit.

Sauf que les heures passaient et que personne ne venait pour lui. Il avait déjà demandé trois fois qu'on lui file au moins un coussin pour se taper la sieste, mais les flics l'ignoraient superbement, ne lui prêtant attention que quand il demandait pour aller aux toilettes. Au bout d'un moment, il comprit qu'il passerait la nuit là et se servit de sa veste pour poser la tête dessus et fermer les yeux. Les bruits des officiers en plein travail le gardèrent éveillé et il n'avait même pas un bout de papier sous la main pour griffonner, ses poches ayant été vidées à son arrivée. Sérieux, quelle perte de temps ! S'il ne s'était pas fait choper, il aurait pu bien avancer dans sa fresque et peut-être même aurait-il eu le temps de passer au Panthéon pour finir une toile ou deux. Mais Adonis traînait et il était coincé là...

Finalement, Cha s'endormit quelques heures pour se réveiller quand un flic déverrouilla sa griller, lui annonçant que quelqu'un était venu payer sa rançon. Lâchant un "enfin" exaspéré, il remit sa veste et se leva pour sortir et suivre l'agent jusqu'à un bureau où attendait... Ankh ? Surpris, le peintre plissa les yeux en s'approchant, le regardant signer les papiers et attendant de pouvoir récupérer ses affaires.

T'en as mis du temps, y avait des embouteillages sur la route ou quoi ?

Un sourire fatigué aux lèvres, il remit son portefeuille dans sa poche et remplit les autres avec son papier, son crayon et son portable, puis vérifia dans son sac à dos pour esquisser une moue boudeuse en constatant que ses bombes de peintures avaient disparu. Bon, il faudra qu'il en rachète. Puis on le fit signer un document qu'il ne prit pas la peine de lire et il suivit son sauveur jusqu'à la sortie.

Merci mec, tu me sauves la vie. Et je te rembourserai dès que je rentre, c'est promis.

Levant une main pour taper l'épaule de son collègue, Cha ouvrit la porte pour sortir du commissariat et le laissa passer devant pour le suivre jusqu'à sa voiture. L'idéal serait qu'ils fassent un détour par son appart pour qu'il puisse se doucher et se changer, mais il supposa qu'ils iraient plutôt directement au boulot, ayant tous les deux des toiles à finir.

T'as faim ? J'offre le p'tit dèj pour te remercier d'être venu. Et aussi pour retarder le moment où je me retrouverai face à Adonis mais faut pas le dire.

Éclatant de rire, il s'imagina déjà les remontrances du Moire, la petite tape sur les doigts avant qu'il soit renvoyé à son travail pour rembourser ses nouvelles dettes. Mais il ne se sentait pas d'affronter ça le ventre vide et mourait de faim après sa nuit en garde à vue.

Oops...

O O T D - Cha n'était pas vraiment fâché qu'on ne vienne le libérer que maintenant, n'était pas du genre à en vouloir aux gens qui venaient le tirer d'un mauvais pas. Il se contenta donc d'un haussement d'épaules et d'une tape dans le dos de son collègue quand il arriva à sa hauteur, le remerciant d'être venu et lui promettant de lui rembourser l'argent quand il en aurait les moyens. Il sortit ensuite du commissariat en compagnie de Ankh, tournant la tête vers lui avec surprise quand il annonça que le remboursement était inutile. Bah, si c'était ce qu'il voulait ! À la limite, il le remercierait avec des repas comme le petit déjeuner qu'il proposait d'offrir ce matin.

Montant dans la voiture de son collègue, Cha s'installa en regardant l'intérieur luxueux d'un oeil admiratif, lui-même n'ayant pas encore les moyens de s'acheter même un vélo. Si quelques semaines plus tôt il était plein aux as, il avait tout perdu en quittant le domicile familial et en se faisant couper les vivres par ses parents. Ruiné, il avait pris une coloc avec le copain de son meilleur pote, façon d'avoir un toit au-dessus de sa tête tout en faisant des économies. Il prenait le bus, aussi, mais ça il avait l'habitude, le prenant déjà régulièrement avant de partir pour aller faire ses fresques partout en ville. Au final, sa vie n'avait pas tellement changé et, à vrai dire, il était plus heureux maintenant qu'il était libre.

Bien sûr que j'offre, je vais pas en plus te demander de payer ma bouffe !

Souriant alors que son ami démarrait la voiture, il attacha rapidement sa ceinture, revigoré par la perspective d'un bon petit déjeuner copieux. Il s'imaginait déjà ce qu'il choisirait, visualisant une assiette bien remplie et un bol - une casserole - de café pour le réveiller et lui donner la force d'affronter cette journée après une nuit désastreuse. S'il trouvait le temps, il se taperait une petite sieste entre deux toiles, mais il n'était pas certain d'y arriver, surtout si, comme il le soupçonnait, Adonis se mettait en tête de le surveiller jusqu'à la fin de son service.

Y a un café à deux pas du Panthéon où ils font des bons trucs, je sais pas si tu vois ?

Tournant vers lui un regard interrogateur, il attendit sa réponse pour voir s'il connaissait ou s'il devrait le guider à travers les rues pour lui montrer le café et un endroit où se garer. Heureusement pour lui, il avait un bon sens de l'orientation, connaissant la capitale comme sa poche grâce à ses nombreuses visites nocturnes depuis qu'il avait emménagé au pays, sachant même certainement mieux se repérer que quelqu'un qui vivait là depuis sa naissance.

Avant d'arriver sur le lieu proposé, il tira son portable de sa poche pour envoyer un texto à Shin et le prévenir rapidement de ce qui lui était arrivé. Il l'avertit aussi de ne plus aller travailler là pour le moment, car il ne savait pas si les flics l'avaient cru quand il avait dit bosser seul et ne voulait pas que son pote se fasse arrêter à son tour alors qu'il pourrait le lui éviter facilement. Il répondit également aux messages de Yoonie qui s'était inquiété de ne pas le voir rentrer de la nuit puis, quand il leva les yeux, ils étaient arrivés à destination.

Précédant Ankh à l'intérieur du café, il salua la serveuse d'un geste de la main puis alla s'asseoir à une table libre au fond de la salle, loin des fenêtres et des regards indiscrets. Rapidement, la serveuse apporta des menus et le thaïlandais prit le temps de parcourir le sien avant de commander au moins trois plats différents ainsi qu'une grande tasse de café pour accompagner le tout. Il laissa ensuite Ankh commander ce qu'il voulait puis s'appuya contre le dossier de sa chaise, soulagé de retrouver le monde extérieur aussi rapidement.

Tu penses qu'Adonis va me virer pour ça ? C'est grâce à mes fresques qu'il m'a repéré donc il est au courant que je le fais, mais j'étais pas censé me faire choper par les flics.

Grimaçant, il regarda Ankh sans trop attendre de réponse, se doutant bien qu'il n'en avait pas à lui fournir. À moins que le boss ne lui ait dit ce qu'il comptait faire, il ne pouvait pas deviner ses intentions, juste dire ce que lui ferait à sa place, ce qui ne les avancerait pas beaucoup. La serveuse revint rapidement avec les boissons, arrachant un sourire à Cha qui accueillit son café de la même façon qu'il avait accueilli son sauveur aux portes de la prison.