outfit Depuis que Hajime était en âge de conduire et qu'il avait accès au compte en banque que son père nourrissait depuis sa naissance, il n'était plus jamais monté dans un bus, sauf peut-être pour une sortie scolaire à la fin du lycée. En tout cas, il n'avait jamais testé les transports en commun Eastlandais, ayant acheté une voiture dès son arrivée et s'étant toujours arrangé pour ne pas la mettre au garage quand il en avait besoin. D'habitude, il faisait sa révision pendant les vacances, quand il pouvait se permettre de rester un jour ou deux chez lui, mais cette année était différente.
Depuis que Haruki était née, le prince ne passait plus une seule journée sans devoir se déplacer, que ça soit pour aller la voir chez Arisa ou pour faire des courses afin d'aider la mère célibataire. Et quand ce n'était pas pour sa fille, il allait voir Yan ou sortait avec des potes. Des vacances peu reposantes pour Hajime, mais il ne s'en plaignait pas. Même si sa vie avait changé et qu'il lui arrivait d'être débordé, il était heureux et ne doutait... presque jamais.
Cette année, donc, Hajime avait du mettre sa voiture en révision tout en sachant qu'il avait besoin de se déplacer souvent. Il s'était toutefois arrangé avec Arisa pour qu'il n'ait pas besoin de faire des courses pour elle pendant ce moment-là, n'ayant pas envie de se promener avec un paquet de couches dans le bus. Il se contenta donc aujourd'hui d'aller rendre visite à sa fille, de soulager Arisa quelques heures en s'occupant des fausses jumelles et lui permettre de se reposer. Parfois, il gardait les filles pour que la mère puisse dormir, parfois parce qu'elle avait besoin d'un bain ou encore pour qu'elle puisse travailler quand la nounou était indisponible. Même si la deuxième enfant n'était pas de lui, Hajime s'en occupait comme si c'était la sienne, d'abord parce qu'il n'avait jamais été en couple avec Arisa et ne lui reprochait pas d'avoir eu deux gosses de deux hommes différents, et aussi parce que... neuf fois sur dix, il était incapable de différencier les nourrissons.
La suite de la journée serait pour lui plus reposante. Il avait prévu de retrouver Yan pour passer un moment en couple, regarder Netflix, manger des chips et simplement traîner ensemble. Il aurait pu être chez lui en vingt minutes s'il avait eu sa voiture, mais le trajet en bus durait près d'une heure. Ne pouvant attendre trop longtemps avant d'entendre sa voix, il l'appela avant de rentrer dans le bus et lui parla pendant dix bonnes minutes, se fichant que les autres l'entendent, même son voisin de banquette. Il raccrocha ensuite sur un "je t'aime aussi" murmuré tout bas puis regarda un peu autour de lui. Personne ne le fixait bizarrement ni rien, mais il avait l'impression qu'on l'avait écouté. Il avait parlé de sa fille et de sa mère pendant sa conversation, donc les gens, s'ils avaient suivi, auraient pu comprendre qu'il n'était plus avec la mère alors qu'elle venait d'accoucher...
Je l'ai pas laissée tomber, hein... La mère de mon gosse, je veux dire. On a jamais été ensemble, c'était un coup d'un soir, la capote a craqué et maintenant j'essaie de l'aider.
Hajime avait lancé ça en direction de son voisin de banquette, comme pour se justifier. Il vit cependant à sa tête qu'il ne voyait pas de quoi il parlait et comprit qu'il n'avait pas écouté la conversation téléphonique. Se tortillant un peu sur son siège, il déverrouilla son portable et alla dans sa galerie photo pour montrer Haruki.
C'est ma fille, Haruki. Je ne pensais pas être père si jeune, mais voilà. Je ne peux pas la reconnaître à cause de mon père, alors je fait en sorte que la mère ne manque de rien. J'ai déjà mis mon père en rogne y a quelques mois quand il a apprit que je sortais avec un mec alors lui annoncer un gosse hors mariage l'aurait achevé.
Même s'il ne savait pas trop pourquoi il balançait tout ça à un inconnu, Hajime continua, racontant l'épisode Yana/Yan, les mensonges de son pote qui s'était déguisé en fille pour sortir avec lui, la façon dont il avait apprit la vérité et leur relation depuis. Il lui expliqua qu'au début il ne voulait pas le dire aux autres de peur que son père l'apprenne, mais qu'un jour il avait réalisé qu'il risquerait de le perdre en le gardant secret. Il lui raconta tout, sans même savoir si le gars l'écoutait ou si il parlait dans le vent. Puis il termina avec la naissance de Haruki deux semaines plus tôt, cette enfant qu'il ne pouvait pas reconnaître mais qu'il aimait quand même.
Quand son voisin prit la parole, Hajime sursauta presque, ayant quasiment oublié qu'il ne parlait pas seul dans l'intimité de sa chambre. Le gars l'avait écouté et le prince ne s'arrêta pas sur sa mine un peu blasée ou fatiguée, haussant les épaules en réfléchissant à sa question.
Un peu, je l'avoue. Au sujet de mon copain, ça va mieux, j'ai apprit à gérer le regard des autres, mon père l'a accepté et ça le rend heureux quand je l'embrasse en public, donc je pense avoir fait la bonne chose. Il me rend heureux aussi, je pense que je suis vraiment amoureux, alors que je pensais être hétéro avant lui... Mais bon. C'est plus pour ma fille que c'est compliqué. Je l'adore et j'apprécie la mère, mais j'ai l'impression que je n'en fais pas assez. Je ne peux pas la prendre chez moi, je vis dans une famille qui a accepté de m'accueillir le temps de mes études, et je ne peux la voir que quelques heures par jour, voire moins. Elle a seulement deux semaines et je suis déjà un mauvais père...
S'arrêtant pour passer une main dans ses mèches, il poussa un soupir, se demandant ce que pensait son voisin de lui. Il devait le trouver horrible, lui qui avait mis une fille en cloque et ne pouvait même pas assumer son gosse pour avoir une garde partagée et la soulager vraiment.
Non, je l'ai su assez tôt, quand il a fallu faire les tests de paternité. J'ai failli m'évanouir en l'apprenant mais j'ai eu le temps de me faire à l'idée, au moins.
Quant à la question des proches, Hajime haussa de nouveau les épaules, n'ayant pas tellement de proches à qui demander conseil ou de l'aide.
Mes parents vivent au Japon dont je ne leur ai pas dit pour Haruki, mon père me tuerait et ma mère... je pense qu'elle serait déçue de moi. Quant à la famille d'accueil, je ne leur parle pas trop, on a une relation plutôt de proprio / locataire. J'ai juste mes potes, qui acceptent assez bien la situation et m'aident quand ils peuvent. Yan, mon copain, est vraiment adorable sur ça, il a accepté que j'allais avoir un enfant sans être choqué ou flipper, et quand il vient la voir avec moi, il est trop mignon avec elle. Je regrette juste qu'elle ne puisse pas porter mon nom... et de lui infliger la vie que j'ai moi-même subie.
Un bâtard qui donne naissance à une bâtarde... c'était pas beau ça ?