Mâchoire serrée, accoudée sur le comptoir des admissions de l'hôpital, Lian fusillait du regard la bonne femme qui se trouvait devant elle et refusait d'accéder à sa requête. Ce n'était pourtant pas compliqué : elle voulait être soignée par un médecin en particulier, uniquement lui, rien que lui. Il était cardiologue et ne s'occupait pas des traumas légers. D'accord, et alors ? Il était en bloc opératoire pour assister une greffe aortique. D'accord, et alors ? Problèmes futiles et contournables avec assez de volonté et de pouvoir.
Je suis la fille de l'ambassadeur Song, ma grande, alors tu vas faire ce que je te dis si tu tiens à ton job. Il possède un siège dans le conseil de l'hopital et y investis chaque mois plus d'argent que tu en gagnes en un an, un mot de moi, deux de lui, et t'es virée. Maintenant tu me files une chambre et t'appelles le docteur Ahn.
Soutenant le regard de l'autre jusqu'à ce qu'elle cède et appelle Angel, Lian sentait sa joue la lancer mais ne montrait aucun signe de douleur. Elle avait l'habitude, se blessait au moins une fois par mois à la boxe et venait à l'hôpital au moins aussi souvent pour ses soins à elle. Rendre visite à son père, elle le faisait tous les deux jours, en alternance avec sa soeur, mais c'était de l'autre côté de l'hôpital. Aujourd'hui, elle était aux urgences pour sa visite mensuelle en tant que patiente et elle se dirigea vers la chambre qu'on lui avait attribuée, satisfaite.
S'asseyant sur le lit, jambes en tailleur sous elle, Lian sortit son téléphone pour regarder ses cheveux, arrangeant ses tresses blondes, et essuya le sang qui coulait de sa pommette jusqu'à son menton. Elle n'était pas à son avantage pour revoir Angel, transpirante dans sa brassière noire, sa veste militaire ouverte et son pantalon de training gris, mais tant pis. Au moins elle était bien coiffée, ses tresses assez serrées pour résister à la pire déconvenue. Il faudrait cependant qu'elle les défasse le soir pour proposer une crinière bouclée aux clients du Redgrove, quand elle aurait troqué ses fringues de sport contre une robe argentée trop courte pour être décente.
Rangeant son portable en entendant la porte s'ouvrir, Lian posa son regard sur Ahn Angel, un fin sourire étirant ses lèvres dénuées de maquillage. Il était beau, il était essoufflé d'avoir certainement couru, il était en colère d'avoir été appelé pour une écorchure, mais il était là. Laissant glisser un pied au sol, la jeune femme se pencha un peu en avant, levant une main pour repousser une tresse tombée devant son visage.
Bonjour docteur ! Un con m'a encore fracturé la pommette. Et je crois qu'une radio des côtes ne serait pas un luxe non plus.
Pointant sa joue en parlant, elle tourna le visage pour qu'il puisse observer l'entaille de cinq centimètres qui balafrait son visage, cerclé d'un hématome violacé de la taille du poing de celui qui l'avait frappée. Accident de boxe, comme le démontrait sa tenue, habituel et courant pour elle qui s'entraînait tous les jours, mais tout de même douloureux.
Je ne vous ai pas vu hier en venant rendre visite à papa. Vous m'avez manqué.
Le regardant brièvement dans les yeux, Lian sourit un peu plus franchement avant de se racler la gorge, mal à l'aise.
Il va bien ? Médicalement parlant, je veux dire. Il me dit toujours qu'il va à merveille mais j'aime avoir votre avis.
Re: les exigences du coeur + Angel Jeu 5 Mar - 16:33
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Courir à en être essoufflé. Courir comme si sa vie en dépendait. Fuir ses flammes qui le rattrapaient.
— Angel ! On te demande aux urgences.
Fuir cette chaleur qui l’inondait. Sécher ses larmes qui coulaient
De cri qu’il souhaitait oublier. Et s’éterniser dans le présent.
— Bonjour docteur !
D’une chevelure blonde et tressée, d’ecchymose qui n’enlevait rien à sa beauté, mais d’un comportement qui l’agaçait. Même ainsi devant lui, Angel ne savait que penser de cette femme. Insupportable. Intrépide. Têtue. Pour sûr. Rien de plus. Ou peut-être que si. D’un regard fugace qui le regardait à peine et d’un sourire éternel aux bouts des lèvres, elle demandait des nouvelles de son père. Se rapprochant d’un pas, le médecin posa ses doigts sur la peau de la danseuse et lui souleva le menton délicatement pour mieux la détailler, pour pouvoir la regarder de plus près. Et ainsi étudiait la profondeur de la blessure qu’elle arborait. Penchant légèrement la tête sur le côté, comme un tic oubliait, il finit par la relâcher après un trop court instant. Ses mains s’activant déjà sur les compresses pour nettoyer le sang. D’un professionnalisme inébranlable et d’un franc-parler considérable, Lian savait que jamais il lui mentirait.
— Assieds-toi d’abord.
Et elle lui avait obéi. S’asseyant sur le lit, attendant une réponse de sa part maintenant. Angel, réitéra ses gestes passés, nettoyant le sang qui coulait. Doucement, lentement pour qu’elle ne souffre pas, les traces écarlate disparaissant bientôt sur cette peau diaphane. Par la suite, il entreprit de penser la plaie, ne se préoccupant pas de la légère douleur qu’elle ressentait quand il appliquait le coton imbibé, n’ayant pas d’autres choix pour qu’elle puisse cicatrisait. Heureusement, même si elle était impressionnante, elle ne méritait aucune urgence. N’importe qui aurait pu s’occuper d’elle, mais non. C’était lui et personne d’autre qu’elle voulait. Comme toujours. Résigné, Angel ne répondait même plus, se contentant de faire son travail. Comme à son habitude.
— Ça va. Il doit se ménager un peu, mais d’après les résultats que j’ai vus hier, il n’y avait rien d’alarmant et je l’ai vu tout à l’heure, tout était normal.
Le pansement était posé, maintenant il pouvait regarder les côtes de la danseuse. D’un signe de tête, il lui intima de s’allonger. Prenant un tabouret, il le fit glisser jusqu’à lui et s’y posa nonchalamment, ouvrant en entier la veste militaire de Lian avant d’en pousser les pans sur les côtés. Désormais, il avait une vue d’ensemble. Il s’abaissa, se courba même tandis que ses doigts gantés tâtaient la peau à la recherche d’une possible fracture pouvant aggraver l’état de sa patiente si tel était le cas. L’obligeant à regarder ailleurs, le jeune homme continuait son diagnostic en reprenant la parole devant le silence habituel de l’hôpital.
— Depuis combien de temps tu as des douleurs ? Est-ce que tu as du mal à respirer ?
Pendant un certain temps, ils n’échangèrent que des banalités. Elle répondait à ses questions et vice-versa. Rien de personnel. Rien d’intrusif. Parce qu’il la repoussait, parce qu’il n’entrait pas dans ce jeu. Parce que tous deux se connaissaient de l’hôpital jusqu’à la salle de boxe. Parce qu’il s’entraînait avec elle et la voyait plus de fois que tous ses patients réunis depuis son intégration aux urgences. Et surtout, parce qu’il n’était pas insensible. A elle. Et c’était dangereux. Trop lumineux. Avec trop d’enjeux. Angel s’écarta, retirant les gants qu’il jeta à la poubelle. Sortant un bloc et un stylo de sa poche, il appela une infirmière et se retourna vers la blondinette.
— Je ne pense pas qu’une radio sera nécessaire. Je vais te faire une prescription et si les douleurs persistent ou d’autres symptômes s’annoncent, tu viens me voir immédiatement.
Après un examen minutieux, il n’avait rien vu de grave, ni sentit un quelconque trauma interne qui l’empêchait de quitter les urgences dans l’immédiat. A l’arrivée de l’infirmière, le docteur Ahn déchira la feuille et lui donna. Le fait d’être la fille d’un homme important, c’était qu’elle n’avait même pas besoin d’aller chercher ses médicaments parce que les employés le faisaient pour elle. Ainsi, elle ne créera aucun scandale dans l’hôpital. L’infirmière repartit aussitôt le papier en main, pour les laisser seul à seul de nouveau. Angel ancra son regard dans le sien, les mains maintenant dans les poches de sa blouse blanche.
— Si tu veux voir ton père, je t’accompagne. Dans le cas contraire, tu peux repartir. Et tu sais déjà que tu n’as pas besoin de me vouvoyer.
Lui avait depuis longtemps abandonné cette idée depuis qu’ils s’étaient rencontrés dans la salle de sport. Et encore moins depuis ses visites ponctuelles à l’hôpital. Tous deux se faisaient désormais face et ni l’un, ni l’autre ne semblait déranger par cette proximité. Mais au contraire, ils semblaient captivés. Même si Angel savait que Lian se battait régulièrement, il ne posait jamais de questions, ni ne lui contre indiquait de continuer. C’était comme s’il ne s’en souciait pas et c’était le cas. Jamais il ne répondait à ses avances, mais jamais il ne lui disait d’arrêter non plus. Parce qu’il en avait trop l’habitude. Il s’était résigné à lui dire de se stopper, la laissant faire ce qu’elle désirait. Même s’il était le médecin, il la laissait libre de chacun de ses mouvements ici. Le brunet ne quitta pas son tabouret même quand la demoiselle posa ses pieds au sol. Pas même lorsqu’elle se dressait ainsi devant lui dans toute sa splendeur. Seulement, l’infirmière revint et donna la petite boîte à Angel qu’il la remit entre les mains de Lian.
— A la prochaine fois, Lian.
S'interdire de tomber. Pour ne pas se brûler. Ou pire encore. Tenter.
vocivus
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Re: les exigences du coeur + Angel Jeu 5 Mar - 22:23
Son père allait bien. Soupirant de soulagement, Lian laissa Angel toucher son visage pour regarder sa plaie, se forçant à garder les yeux ouverts pour ne pas montrer que ce contact lui plaisait. Elle savait que son père allait bien, les médecins lui disaient à chacune de ses visites que son état était stable et qu'on attendait un donneur compatible, mais elle s'inquiétait toujours. Elle s'inquiétait jusqu'à ce qu'Angel lui dise qu'il ne risquait pas de mourir pendant la nuit, étant le seul à parvenir à la rassurer.
Elle ne montra rien de sa douleur tandis qu'il la soignait, restant parfaitement immobile et imperturbable, son regard fixé sur le mur devant elle. Puis il lui signifia qu'elle pouvait s'allonger pour qu'il regarde ses côtes et elle obéit, lui laissant le soin d'écarter les pans de veste, relevant elle-même sa brassière jusqu'à la limite du raisonnable pour dégager ses côtes douloureuses. Les gants d'Angel étaient froids sur sa peau et Lian ne pu retenir un frémissement quand il posa les doigts sur sa cage thoracique.
Ca date d'aujourd'hui à l'entraînement et je respire bien, ça va. Vous n'étiez pas là et je me suis encore retrouvée contre l'autre misogyne. Il s'est bien défoulé, mais je lui ai pété le nez je pense. Il avait l'air tellement pathétique, c'était... satisfaisant.
Levant les yeux vers Angel, elle esquissa un sourire, sachant qu'il comprendrait de qui elle parlait. Le misogyne était réputé pour se montrer particulièrement violent envers les rares filles du club, ne les laissant jamais quitter un combat sans les avoir blessées. Mais Lian ne se laissait jamais faire, et aujourd'hui encore elle l'avait battu, malgré les blessures qu'il lui avait inculquées. Serrant les dents pour ne pas montrer sa douleur, elle répondit aux questions d'Angel. Oui j'ai mal. Non pas là. Là non plus. Là j'ai mal. Finalement, il s'écarta et lui tourna le dos.
Soupirant, Lian se redressa, basculant ses jambes dans le vide pour les balancer à un rythme lent. Regardant le dos d'Angel, elle attendit son verdict, se retenant de porter une main à sa joue où le pansement la gênait atrocement. Elle savait bien qu'elle devrait le garder plusieurs jours, mais tous deux savaient aussi que le soir même elle jetterait la compresse à la poubelle et se contenterait de mettre de la pommade pour soigner la blessure. La fracture guérirait seule, comme toujours. Elle hocha la tête face au verdict de son médecin. Rien de grave.
On se reverra demain de toute façon, si j'ai la chance de vous croiser en rendant visite à mon père.
Une pointe d'espoir transparu dans sa voix, mêlée à une question informulée. Serait-il là quand elle viendrait ? Le croiserait-elle ? Voudrait-il la voir ? Tant de questions qu'elle voulait lui poser et auxquelles elle savait qu'elle obtiendrait des réponses, mais elle n'osait pas. Elle savait qu'il était honnête, peut-être un peu trop. S'il ne voulait pas la voir, il le lui dirait cash et elle serait blessée, peut-être un peu trop. Soupirant face à son absence de réaction, Lian se résigna au silence, le regardant envoyer une infirmière lui chercher ses médicaments. Un sourire en coin étira ses lèvres quand il lui rappela qu'elle pouvait le tutoyer, conversation qu'ils avaient chaque fois qu'elle était sa patiente.
Quand nous sommes à la salle, oui, mais ici vous êtes mon médecin. Je...
Interrompue par le retour de l'infirmière, Lian serra les dents de frustration, fusillant la femme du regard jusqu'à ce qu'elle ressorte. Elle n'aimait pas qu'on la dérange quand elle était avec Angel, chérissant ces trop rares tête-à-tête, même s'il ne s'y passait jamais rien. Le médecin posa la boite de médicaments dans sa main en la saluant, mais elle n'avait pas dit son dernier mot. Refermant ses doigts sur ceux du docteur, elle le retint avec un mélange de douceur et de fermeté, levant les yeux vers lui, attendant qu'il la regarde en retour.
J'aimerais beaucoup que vous m'accompagniez voir mon père. Il va s'inquiéter de ma blessure et seul un médecin pourra le rassurer.
Caressant inconsciemment le dos de sa main avec son pouce, Lian s'interrompit en réalisant son geste. Son visage se plissa imperceptiblement tandis qu'elle se maudissait de ne pas avoir contrôlé sa main, puis elle se releva, forçant Angel à reculer pour que leurs corps ne se percutent pas.
Re: les exigences du coeur + Angel Sam 7 Mar - 17:00
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Pourquoi ? Il ne le savait pas lui-même. Peut-être était-ce regard, sa voix, cette main, mais pour une fois, sa raison le quitta. Pour la première fois, il ne reculait pas. Non. Il ne lâcha pas ses doigts qui caressait sa peau tendrement. Il ne s’écartait pas même si elle était trop près lui. Même si peu de centimètres les séparaient, il ne faisait rien pour combler l’espace ni l’accentuer. Non. A la place, il gardait sa grande main dans celle de la jeune femme. Presque imperceptiblement au début avant qu’il ne la serre franchement l’instant d’après. Pourquoi ? Il ne savait pas. Et c’était bien ça le problème.
Penser pour ne pas sombrer. Se contrôler pour ne faire d’erreur. Ou peut-être que si. Pour…
Reculant doucement, Angel poussa du bout du pied le tabouret qui le dérangeait. Avec un hochement de tête, il accepta la requête de Lian. Leurs mains toujours liées, il les dissimula dans la poche de sa blouse immaculée, obligeant leurs corps à se frôler et leurs épaules à s’entrechoquer. Il quittait doucement les urgences en sa compagnie, adaptant son allure à celle de la blondinette à ses côtés. Il ne parlait pas et n’en voyait pas l’intérêt. C’était déjà assez miraculeux que le personnel de l’hôpital ne remarquât ce qu’il cachait assez visible pourtant si l’on regardait bien. Mais le brunet mettait un point d’honneur à la discrétion et sachant le comportement de la demoiselle, personne n’osait venir à eux. Personne n’osait faire face à la danseuse. Ainsi, même entouré de différentes personnes, malgré le brouhaha et la cohue incessante qui s’animait autour d’eux, personne ne faisait attention à leurs doigts entrelacés par un infime mouvement inédit, de la part du médecin.
— Même si je parviens à le rassurer, il s’inquiétera toujours pour toi. Qu’importe ce que je pourrais dire. Tu restes sa fille après tout.
Angel avait tissé un lien assez particulier avec cette famille. Depuis que la boxeuse ne réclamait que lui et uniquement lui, l’orphelin avait été en charge du père de cette dernière à titre exclusif. Et comme elle venait assez régulièrement, il échangeait beaucoup plus avec le vieil homme qu’il ne l’avait jamais fait avec son propre père de toute sa vie.
Eviter le passé pour vivre dans le présent. Tout écraser. Tout brûler. Comme cette nuit enflammée.
Les deux adultes bifurquèrent de couloirs en escaliers jusqu’à d’autres couloirs. Angel n’étant pas très bavard, il écoutait les péripéties de celle à ses côtés. Dans un sens, c’était assez réconfortant. Cette impression de ne pas être seul. Mais tellement étrange à la fois. Le médecin était si froid, si distant avec elle. C’était un mystère complet sur le fait qu’elle continuait à ne réclamer que lui. Mais jamais, il ne demandait. Parce qu’il savait. L’avait toujours su. Mais c’était bien plus cruel d’ignorer, de contourner la vérité pour ne pas s’y plonger et se confronter à ses difficultés. A ses enjeux. A elle. A lui. A eux.
— Je vais devoir remettre notre séance de demain à plus tard. Mais nous nous verrons au chevet de ton père.
Il ne s’expliqua pas et elle ne posa pas de questions parce qu’elle savait qu’il ne répondrait pas. Comme toujours. Mais lui savait. Il devait sortir avec des amis ce soir. Ou plutôt être traîner par des amis. Quelque part. Il ne savait pas où et c’était une surprise qu’il n’était pas sûr d’apprécier. Ou peut-être que si. N’y pensant pas davantage, il libéra la main de sa partenaire pour ouvrir la porte de la chambre du père de cette dernière. L’absence soudaine de contact, de cette chaleur nouvelle ne lui fit pas grand effet. Parce qu’il ne s’y attarda pas. Laissant le soin à Lian d’entrer la première, il la suivit, fermant la porte derrière eux. Avec un faible sourire et un signe de tête, il regardait les derniers mots laissaient par les infirmières avant de se concentrer sur les constantes.
— Elle n’a rien de grave, je vous rassure. Quelques jours et le mal aura disparu.
Angel fit vœux de silence par la suite. S’effaçant presque pour laisser un père et une fille discutait, levant parfois les yeux vers eux tandis qu’il contrôlait la respiration, le cœur et tout ce qui était en son devoir en tant que médecin de s’assurer que son patient allait bien. Il répondait de temps à autre par de petites phrases, mais rien de significatif. Son stéthoscope autour de son cou, le jeune homme commençait à s’éclipser, mais arrêta sa main sur la poignée de la porte en entendant la voix de Lian à son encontre. Surpris, il se retourna. Son visage n’exprimait pas grand-chose parce qu’il dissimulait ses expressions rapidement, mais il chercha tout de même les yeux de son interlocutrice pour s’y plonger sans jamais revenir en arrière.
— Prenez votre temps tous les deux. Je t’attends dans le couloir, Lian.
Et c’est ce qu’il fit. Il prit appui contre le mur et regardait son portable, mais aucun message d’urgence n’avait été envoyé. Soupirant, il ferma les yeux un court instant avant de les rouvrir pour discuter avec une jeune femme qui lui demandait bons nombres de choses. Inquiète, il ne la laissa pas dans cet état et prit soin de répondre à chacune de ses questions et même de la conseiller, regardant les papiers qu’elle tenait en main, affichant parfois un sourire pour la rassurer. C’était à peine s’il avait remarqué la porte s’ouvrir et en sortir la danseuse. C’était à peine s’il l’avait vu et entendu venir dans leur direction. Parce qu’il continuait de parler en tant que parfait médecin qu’il était.
vocivus
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Re: les exigences du coeur + Angel Dim 8 Mar - 16:47
Baissant les yeux avec surprise, Lian regarda leurs mains jointes, leurs doigts entrelacés, ceux d’Angel serrant les siens pour la première fois. Elle s’était attendue à ce qu’il recule, comme toujours, qu’il la repousse et la refroidisse d’un regard désapprobateur, mais il n’en fit rien, et elle en fut heureuse. S’ouvrait-il enfin à elle ? Allait-il enfin la laisser entrer dans son monde, dans son cœur ? Bloquant sa respiration avant de trop espérer, elle ne fit aucun commentaire, de peur de gâcher l’instant et de le faire réaliser son geste. Docile, elle le suivit dans les couloirs, sa main cachée dans la poche de sa blouse avec une discrétion toute relative, prête à assassiner du regard quiconque baisserait le sien vers cette poche où la chaleur de leur étreinte réchauffait son cœur.
Ils arrivèrent finalement à la chambre de son père et Angel s’arrêta juste devant pour lui expliquer qu’ils ne se verraient pas à la boxe le lendemain. Son visage soudain parcouru de tristesse, Lian ouvrit la bouche pour demander des explications mais, face à l’expression fermée du médecin, elle se contenta de hocher la tête avec déception. Qu’avait-il de mieux à faire que la retrouver à la salle ? Un rendez-vous ? Une opération ? Une autre femme ? Tentant de ravaler sa jalousie, elle récupéra sa main quand il la lâcha, essayant d’ignorer la sensation de froid qui l’envahit soudain. Lui n’avait pas l’air d’en souffrir, évidemment, et elle se demanda s’il n’avait pas tenu sa main par pitié. Se trouvant bête, elle alla rejoindre son père, serrant ses doigts et le rassurant quant à sa blessure. Angel aussi lui dit que ce n’était rien et l’homme accepta finalement de les croire. Ils parlèrent un peu pendant que le médecin prenait les constantes de son patient, affirmant que tout était normal. Puis il fit mine de s’éclipser sans dire au revoir et Lian leva les yeux vers lui.
Docteur !
Quand il croisa son regard, elle lui reprocha au travers de ses prunelles de partir comme un voleur, lui montrant sa tristesse et son besoin de continuer à lui parler, ne serait-ce que trente secondes. Semblant la comprendre, il lui dit l’attendre dans le couloir et le soulagement arracha un sourire à la jeune fille qui hocha la tête en le laissant partir. Elle resta encore quelques petites minutes auprès de son père, lui parlant de tout et de rien, puis elle sorti en voyant qu’il s’endormait, ayant constamment besoin de repos à cause de son cœur fatigué. Poussant la porte avec un sourire, elle chercha Angel du regard et le trouva non loin d’elle… en compagnie d’une femme. S’approchant, elle s’attendait à ce qu’il tourne la tête vers elle, qu’il la regarde, qu’il réagisse ne serait-ce que par un frémissement à sa présence, mais rien. C’était comme si elle était invisible, comme si elle ne comptait pas. Vexée, elle repoussa ses tresses derrière ses épaules et passa devant lui sans le regarder, se dirigeant vers la sortie en empêchant sa tristesse de déborder.
Quelques heures plus tard, vêtue de sa robe argentée qui ne cachait pas grand-chose de son corps, Lian plaçait sur son visage le masque noir qui dissimulait la ligne de ses yeux et la blessure sur sa pommette débarrassée de son bandage. Son vêtement lui arrivait en haut des cuisses pour ne pas la gêner pendant ses danses et une fermeture éclair partait d’entre ses seins jusqu’à son nombril pour pouvoir gérer l’ampleur de son décolleté. Dessous, des sous-vêtements en dentelle noir qui ne cachaient que ce qu’il fallait. Ses mèches bouclées retombant sur ses épaules nues et ses lèvres peintes en rouge la rendaient méconnaissable pour qui ne la connaissait pas assez. Sa sœur la reconnaissait, évidemment ; son frère le pourrait aussi, tout comme leur père, mais presque personne d’autre ne le pourrait.
Enfilant ses hauts talons noirs, elle sorti de sa loge pour se rendre dans la salle, affichant son sourire docile pour les clients qui applaudirent son arrivée. Le Mocking bird était prêt à faire son show… Montant sur la scène qui lui était réservée ce soir, à gauche des deux autres danseuses, elle commença sa performance, d’abord doucement pour s’échauffer, puis effectuant des mouvements plus complexes et difficiles autour de sa barre de pole dance.
Elle dansait depuis une demi-heure environ, la salle se remplissait, l’ambiance s’échauffait. Les billets s’accumulaient sur le sol de sa scène, pourboires de ses clients et encouragements à baisser sa fermeture éclair de quelques centimètres supplémentaires. Ce qu’elle fit. La dentelle de son soutien-gorge était visible, provocante de vulgarité, mais elle s’en fichait. Ce n’était que de la peau, de la chaire semblable à celle de n’importe qui. Avec les années, elle avait appris à accepter que les hommes regardent son corps et l’insultent. Elle avait appris à ne pas réagir à ces agressions sexuelles consenties. Avait appris à ne plus considérer son corps comme un objet de valeur.
Ses doigts toujours sur le sautoir de sa robe, Lian déplaça son regard vers l’entrée de la salle, comme attirée par le groupe qui venait d’entrer. Elle en reconnu l’un ou l’autre pour être des habitués, hommes d’une vingtaine d’années qui aimaient la regarder, l’insulter, la toucher. Puis l’un d’eux avança d’un pas, dévoilant caché derrière lui le médecin qui faisait chavirer son cœur. Se figeant face à cette vision, croisant son regard le temps d’une respiration, Lian se senti paniquer. Et s’il la reconnaissait ? Et s’il disait tout à son père ? Remontant sa fermeture éclair sous les huées des clients, elle reprit sa danse comme si de rien n’était, s’efforçant de ne plus regarder dans la direction du médecin tout en sachant qu’il venait vers elle, poussé par ses amis.
Tous s’assirent devant elle, faiblement éclairés par des lumières tamisées tandis qu’elle avait trois spots pour elle seule. À chaque pirouette, sa culotte était dévoilée. À chaque billet qui tombait, elle baissait imperceptiblement le sautoir de sa robe. Pour la première fois de sa vie, elle eut honte de ce qu’elle faisait. Elle aurait voulu se cacher, s’enfuir, partir en courant, mais elle avait besoin de ces billets qui tombaient à ses pieds. Des larmes montèrent à ses yeux aux premières insultes balancés par les amis d’Angel. Il la traitaient de pute, de vendue, de garce. Ils voulaient qu’elle retire sa robe. Voulaient qu’elle danse comme la chienne qu’elle était. L’un d’eux, assis au centre, lui fit signe d’approcher, brandissant des billets dans sa main. Humiliée, Lian s’avança jusqu’à s’asseoir à califourchon sur ses genoux, s’obligeant à regarder partout sauf dans la direction d’Angel, assez proche pour faire affoler son cœur. Se penchant vers celui sur lequel elle était assise, la danseuse posa une main sur son épaule, l’autre sur sa cuisse, et inspira profondément pour contrôler les tremblements de sa voix.
Tu connais la chanson, chéri. Tu regardes, tu touches, mais tu arrêtes quand je dis stop.
Chaque fois le même refrain, chaque fois la même rengaine. Baissant encore un peu sa fermeture éclair pour dévoiler son sous-vêtement et les pâles demi-lunes de ses seins, elle entoura la nuque du gars de ses bras, bougeant lentement ses hanches sur lesquelles étaient posées les mains de l’autre. Ses amis riaient, se moquaient, glissant des billets dans son décolleté tandis qu’elle retenait ses larmes. Puis les doigts du gars descendirent trop bas, voulurent remonter sa robe, signant la fin de la prestation.
Ca suffit comme ça.
S’arrachant à ses mains perverses, Lian remonta la fermeture de sa robe au plus haut et rassembla ses billets pour les apporter au vigile qui les lui garderait jusqu’à la fin de son service. Lui glissant qu’elle prenait une pause, elle se dirigea vers la sortie de service donnant sur une ruelle à l’arrière, s’emparant au passage d’un manteau pour ne pas attraper froid. S’appuyant contre le mur encore tiède, elle laissa couler ses larmes, les cueillant dès qu’elles tombaient pour ne pas gâcher son maquillage, se demandant pourquoi il avait fallu qu’il vienne là. Pourquoi il avait des amis aussi douteux. Pourquoi il ne l’avait pas protégée.
Re: les exigences du coeur + Angel Sam 14 Mar - 16:03
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Surprenant. C’était le mot qui venait à la bouche d’Angel quand ses compatriotes l’emmenèrent à un endroit spécifique. Il n’était pas du genre casanier, mais les clubs n’étaient pas particulièrement son truc et son air bougon en était la preuve vivante. Pourtant, il avait accepté pour un ami en particulier qui s’était excusé, ne sachant pas non plus dans quoi il s’embarquait. Et ne souhaitant pas le laisser seul, il était venu. Tout se passait plutôt bien au début, jusqu’à la pole dance. Alors, que le médecin était assis, ses pupilles sombres s’étaient focalisés sur la demoiselle blonde qui dansait élégamment et sensuellement autour de la barre. Auréolé d’un masque, il ne savait pas de qui il s’agissait, mais une impression familière le submergeait et n’en ayant rien à faire de ses camarades, sa pleine attention était focalisée sur la jeune femme. Ce sentiment s’agrandit lorsqu’elle s’approchait et étant maintenant vers l’un de ses collègues, le doute se volatilisa en lui aux paroles qui sortaient de la bouche de Lian. Lian. Sa Lian. Dissimulant sa surprise pour ne pas qu’on lui pose de questions, il ravalait bons nombres de choses en lui. Angel ne jugeait pas, mais se questionnait quant à la présence de la blondinette ici, en ce lieu particulier. Lorsque le show se termina par un excès d’un de ses amis, la boxeuse disparut de son champ de vision, n’étant jamais entré une seule fois en contact avec lui. Se séparant des autres médecins, le brunet voguait à travers le club à la recherche de sa partenaire. L’ayant observé, ses conclusions le conduire jusqu’à l’extérieur du bâtiment. C’est là qu’il la vit. Contre le mur pour rependre un souffle. Emmitouflé dans un manteau pour ne pas avoir froid. Essuyer ses larmes pour ne pas qu’elles gâchent son maquillage. C’est ainsi que lentement, le cadet s’approcha de son aîné pour se positionnait à ses côtés. Les mains dans les poches de sa veste, il ne tenta rien. Il savait que l’ouragan n’allait pas tarder à l’engloutir. Que le vent allait tout saccager. Que les paroles allaient être virulentes et les gestes brutaux.
— Je ne te juge pas.
Et c’était la vérité et clairement pas ce qu’elle souhaitait entendre. Parce que soudainement, elle releva la tête vers lui et du coin de l’œil, le médecin vit une main se levait dans sa direction et un bruit sourd résonnait dans la ruelle silencieuse. La claque avait été magistrale et le temps d’un battement de cœur, Angel affichait une surprise pleinement visible sur son faciès. Croisant son regard, il y brillait une réelle lueur interrogatrice face à ce geste contre sa personne. Ceci du animer encore plus la colère de sa compagne parce qu’elle fronçait les sourcils, les traits de colère n’enlevant en rien sa beauté naturelle et était surtout prête à en remettre une couche. Le cadet ne se laissa pas faire quand il attrapa le poignet de son interlocutrice. Doucement, puis plus fermement, il glissa sa main dans la sienne pour la retenir de réitérer sa manœuvre. Sa joue était encore rouge et lui picotait, non pas qu’il s’en souciait pour l’heure.
— Pourquoi ? Qu’est-ce que j’ai fait ou pas fait pour mériter ça ? Si tu m’en veux pour les autres, je ne pense pas que ce soit mérité. Certes, ils n’auraient jamais dû te parler comme ils l’ont fait, ni te traiter de la sorte, mais ils sont adultes. Je n’ai rien à redire. Pas ici. Même s’il s’agit de toi, je n’ai aucun droit. Ce sont leurs pensées et leurs façons d’agir, je n’ai rien à avoir avec eux.
C’était brutal, mais c’était sa vérité. Depuis le début de son arrivée sur scène, Angel n’avait pas pu décrocher ses yeux d’elle. Parce qu’elle le captivait d’une manière qu’il ne pensait pas possible. Parce qu’elle faisait naitre des choses en lui auxquelles il ne souhaitait pas penser. Il était un homme. Peut-être froid et distant, mais malgré tout, il n’était pas en mesure de tout dissimuler. Ce désir dans son regard, cette tendresse à son égard - même si celle-ci était changée par une étincelle d’incompréhension et de colère également aux vues de la situation présente. Il avait été plus que surpris de la découvrir travailler ici, mais il ne jugeait, ni ne critiquer. Il lâcha sa main pour poser ses paumes contre ses joues, essuyant d’un revers du pouce les larmes qui s’écoulaient tristement sur sa peau.
— Tu peux m’en vouloir autant que tu le souhaites Lian, mais ça s’est passé que tu le veuilles ou non. Je sais désormais et rien ne changera pour autant. Tu resteras ma coach sportive et ma patiente.
Angel ne s’aventurait pas sur un sujet nébuleux. Pas quand il s’agissait de la jeune femme en face de lui. Pas quand ses doigts glissaient sur sa peau, se rendant compte qu’elle avait retiré le pansement pour son masque et donc sa performance de ce soir. Pas quand il découvrait pour la première fois les contours de son visage autrement que par des soins, ses iris chocolatées suivant la ligne fine de ses lèvres jusqu’à remonter pour rencontrer son regard. Il n’écoutait que brièvement ce qu’elle lui disait parce qu’elle était du type, tempétueuse et donc elle s’énervait plus vite qu’autre chose, lui en voulant pour des choses auxquelles lui-même n’avait aucun regret. Parce qu’elle pouvait trop parler qu’il avait appris à ne pas céder à ses pulsions, mais pas ce soir. Pas alors, qu’il venait de passer une journée fatigante, pas quand il avait découvert un secret interdit de Lian. Pas quand il la regardait de cette manière, qu’il s’approchait d’elle comme jamais il n’avait fait auparavant. Le médecin ne cherchait pas à la réconforter non, parce qu’il ne voyait pas ce qu’il pouvait faire pour arranger la situation, pour enlever la gêne qu’elle doit ressentir devant le spectacle tout à l’heure. Ce qu’elle ne se doutait peut-être pas, c’était qu’Angel n’en avait cure. Le regard des autres, il s’en foutait. Ce que pensaient les autres, il ne les écoutait pas. De ce fait, le jeune homme voulait qu’elle fasse comme lui en cet instant présent.
— Je m’en fous Lian. Que tu fasses du pole danse ou de la broderie ou même dealeuse, ça ne change pas la personne que je connais et qui est toi. Tu peux continuer à être en colère, à avoir honte, à m’en vouloir ou n’importe quelle autre connerie du même genre, que je m’en foutrais encore. Tu fais ce que tu fais pour vivre, c’est tout. Ça ne change rien. Tu es toujours aussi magnifique dans cette robe que dans ton survêtement. Maquillé ou en train de pleurer.
Il parlait de trop et détestait cela. Cela faisait bien longtemps qu’il n’avait pas eu à faire d’effort pour une fille. A la rassurer et toutes ces petites choses du quotidien qu’il ne devrait pas faire et qu’il faisait tout de même. Il leva les yeux au ciel de son propre comportement qui ne se réitéra pas de sitôt, il s’en fit la promesse solennelle. Et pour mettre un terme aux jérémiades de sa compagne, ses lèvres d’Angel rencontrèrent les siennes pour la première fois. Avec maestra, il avait fait un pas en avant, brisant l’espace infime qui les séparait. Sa bouche épousait parfaitement la sienne, la découvrant lentement tandis que sa main s’égarait à l’arrière de sa nuque, parcourant sa chevelure de blé. Ses mots, il les avalait. Son souffle, il le lui prenait. Sa chaleur, il le ressentait. C’était comme si plus rien n’avait d’importance que cet instant présent. Lui. Elle. Eux. Ses sens s’enflammaient. Son cœur glacé se réchauffait. La douceur de ses lèvres, il le découvrait et apprécier. Le baiser, elle le lui rendit et toujours avec une douceur commune au médecin, il l’approfondissait. Son corps rencontrait les formes de la jeune femme parfaitement, comme s’ils étaient faits pour se rencontrer. Mais cet instant magique se brisa aussi vite qu’il était apparu. La porte s’ouvrit brutalement pour laisser apparaître une tête de jeune médecin. L’ami et le seul n’ayant pas critiqué une seule fois Lian. Voyant les deux êtres se séparaient -très légèrement, celui-ci rougit subitement.
— Ah.. Euh.. Je voulais pas... — Retourne en salle, je t’envoie un message pour te prévenir. — Ah.. D’acc.. Angel.. Ah-Euh.
Bafouillant, il adressa un signe de tête avant de disparaitre. Angel qui ne s’était toujours pas écarté, soupira doucement, croisant enfin son regard après le baiser inédit qu’ils venaient de s’échanger. Ou plutôt, qu’il lui avait imposé.
vocivus
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Re: les exigences du coeur + Angel Sam 14 Mar - 18:34
Des bruits de pas firent relever la tête à Lian, regardant qui approchait. Lui. Il fallait que ça soit lui... Angel l'avait visiblement reconnue, sinon il ne l'aurait pas suivie, et ça lui faisait encore plus mal. Il savait que c'était elle et il n'avait rien fait pour arrêter ses amis, ne les avait pas fait taire, n'avait pas retirer ces mains perverses de ses hanches. Il avait simplement regardé en silence, les avait laissés faire sans bouger le petit doigt pour la défendre ou la protéger. Et maintenant il venait.
Il ne jugeait pas. Très bien, tant mieux pour lui. Lian, elle, elle le jugeait. Quand il fut assez près, elle leva la main et le gifla sans avoir prémédité son geste, ne le réalisant que quand sa paume lui brûla. Elle n'avait pas voulu le frapper, mais c'était plus fort qu'elle. Elle lui en voulait, et qu'il commence par "je te juge pas" plutôt que par "excuse-moi" la mettait hors d'elle. Et encore, elle avait été gentille : elle aurait pu fermer le poing, s'était contentée du plat de la main pour faire plus de bruit que de mal.
Je m'en fiche.
Son air interrogateur, comme s'il ne comprenait pas, n'arrangea rien à la situation. Relevant la main pour une gifle cette fois volontaire, Lian fut arrêtée dans son élan par les réflexes d'Angel qui la retint en attrapant son bras. Voulant s'écarter, la danseuse se laissa néanmoins faire quand il prit sa main, hésitant. Elle lui en voulait, mais ce contact... c'était tout ce qu'elle voulait. Serrant les dents quand il demanda pourquoi elle l'avait frappé, disant qu'il n'avait rien à voir avec ses amis, Lian le fixa avec incompréhension. Il ne voyait vraiment pas le problème ? Il ne réalisait pas que c'était justement son inaction qu'elle lui reprochait ?
Tu aurais pu les arrêter ! Me protéger, me défendre, les faire taire... N'importe quoi. Mais t'as rien fait.
Acculée contre le mur, elle n'avait aucun moyen de s'échapper. Fixant Angel droit dans les yeux, exprimant sa rage et sa déception au travers de ses prunelles, elle frissonna légèrement quand il entoura son visage de ses mains, craignant qu'il l'embrasse tout autant qu'elle l'attendait avec espoir. Il continuait de parler, alignait en quelques minutes plus de mots qu'il ne le faisait habituellement en une heure. Il parlait et il ne comprenait pas le problème. Certes elle se sentait honteuse qu'il ait découvert son secret, avait peur que son regard sur elle change, mais ce n'était pas pour ça qu'elle lui en voulait.
Soupirant face à ses mots, elle ne lui répondit pas. Quel intérêt, puisqu'il n'écoutait pas ? Il disait que rien ne changerait entre eux, mais tout avait déjà changé, au contraire. Elle lui en voulait et lui savait son secret. Il ne pourrait plus soigner son père, elle aurait trop peur qu'il lui dise par accident ou exprès. Elle ne pourrait plus boxer avec lui sans la tentation de le castrer volontairement. Il lui disait qu'il se fichait de ses activités, qu'elle était belle quoi qu'elle porte. Mais elle ne le croyait pas. Personne ne pouvait s'en ficher.
Alors ça ne te dérange pas ? J'expose mon corps à des pervers tous les soirs et tu t'en fiches ? Tu te fiches que je me fasse traiter de pute tous les soirs ? Que des mains se baladent sur ma peau, que des gens tentent d'aller plus loin, parfois de me violer, ne te fait rien ? Tu es vraiment un...
connard. Elle avait voulu le traiter de connard, mais les lèvres d'Angel se plaquèrent sur les siennes, la réduisant au silence. En colère, elle tenta de se débattre, de le repousser, pendant une ou deux secondes, mais c'était si doux, si bon... Ce baiser, elle l'avait attendu pendant longtemps, des mois, des années, depuis qu'elle avait posé les yeux sur ce bel étudiant en médecine qui avait été mis sur le cas de son père. Elle avait rêvé de cette union pendant si longtemps qu'elle oublia sa colère le temps de la savourer, juste quelques secondes.
Posant une main dans le cou d'Angel, l'autre dans son dos pour le tirer vers elle, Lian lui rendit chacun de ses baisers. Oubliant tout le reste le temps de cet échange, elle embrassa ses lèvres, capturant sa peau entre les siennes, le laissant faire quand il approfondit le baiser. C'était parfait, tout en étant absolument imparfait. Parce qu'elle portait son masque et qu'il l'empêchait de partir en la coinçant contre le mur. Gémissant quand elle entendit la porte s'ouvrir, la danseuse tourna la tête dans l'autre direction pour cacher son visage au gars qui les avait surpris. Un ami d'Angel, visiblement. Celui-ci le renvoya à l'intérieur, ses mains toujours sur le corps de Lian.
De nouveau seuls, la magie de l'instant brisée et oubliée, la jeune femme repoussa Angel, le forçant à retirer ses mains et à reculer. Elle ne voulait plus qu'il la touche, qu'il l'embrasse, qu'il la regarde. Refermant son manteau avec ses bras croisés, elle essuya ses lèvres, espérant que son maquillage était resté en place. Elle était de toute façon bonne pour un tour dans sa loge pour une retouche avant sa prochaine danse. Baissant les yeux, elle soupira, serra les dents, puis elle regarda le médecin avec une colère renouvelée.
Tu me dégoûtes, t'es pas mieux que les autres en fait. Tu dis que je suis belle en tenue de sport mais ce n'est qu'après m'avoir vue dans cette robe de pute que tu m'embrasses.
Rageuse, elle se décolla du mur et fit les cents pas dans la ruelle. Elle ne voulait plus qu'il la coince entre ses bras confortables, ne voulait plus lui montrer ce qui se cachait sous son manteau. Il la voyait maintenant comme un objet dont il pouvait disposer et elle ne supportait pas ça. Elle sentait son coeur se serrer un peu plus à chaque mot qu'elle prononçait, trouvant ironique d'être celle qui le repoussait.
Ca fait des mois que je te lance des signaux, Angel, et tu m'as toujours repoussée. Ne vas pas prétendre que tu n'avais pas remarqué, mon attirance pour toi était évidente, et non, je n'ai pas utilisé l'imparfait par erreur.
S'arrêtant, elle pointa un index accusateur vers lui, laissant sortir sa colère. Le fusillant de son regard assassin, elle le dissuada de prendre la parole. Elle n'avait pas fini. D'autant que sa pause se prolongeait et que le vigile ne tarderait pas à venir la rechercher, la rappeler à l'ordre pour qu'elle fasse ses heures et reçoive le salaire qu'elle méritait.
Je suis pas assez belle en survêtement, ne mens pas. Je sais que le style transpiration et zéro maquillage n'est pas le préféré des mecs mais je te croyais différent. Et pourtant nous voilà ! Je porte une robe, j'ai montré mon décolleté, j'ai dansé et - ô miracle - tu réalises enfin que je suis jolie et que je suis désirable ? Je ne suis pas un objet, Angel, si je ne suis pas assez bien pour toi le jour, alors n'espère même pas m'avoir le soir.
Reprenant son souffle, elle secoua la tête, dégoûtée par la nature des hommes. Ils étaient superficiels, ne voyaient les femmes que comme des morceaux de viande et choisissaient les plus jolies pour partager leurs vies. Une femme en pantalon qui tape dans un punchingball n'est pas assez sexy ? Mettez-lui une robe et du maquillage et tous les hommes seront à ses pieds ! C'était humiliant et répugnant. Si Lian avait déjà rencontré bon nombre d'hommes de ce genre, la déception et la douleur de réaliser qu'Angel en faisait partie n'en était pas moins grande. Quand la porte se rouvrit pour laisser passer le vigile, la danseuse se dirigea vers lui avec docilité, se retournant avant de passer l'encadrement.
Je dois retourner au maquillage. Ca vous laisse cinq minutes pour dégager, tes potes et toi.
Sans le regarder, elle suivit le vigile dans les coulisses, rejoignant sa loge pour constater les dégâts. Son mascara n'avait pas trop coulé, mais son rouge à lèvres s'était étalé, preuve de son baiser avec ce connard. Attrapant une lingette démaquillante, elle essuya ses lèvres avec force, jusqu'à ce que sa peau soit rose et qu'une nouvelle dose de fond de teint soit nécessaire...
Re: les exigences du coeur + Angel Mar 14 Avr - 18:38
« when the mask falls off »
‟ I see you for the first time „
Il l’a attendu. Pourquoi ? Lui-même ne le savait pas. Peut-être ses mots, sa façon de réagir, ce qu’elle avait craché à son visage avec tant de véhémence et qui l’avait fait cogiter alors, qu’il ne devrait pas. Parce que ce n’est pas dans les habitudes d’Angel de faire cela. Soupirant, il attrapa son verre qu’il porta à ses lèvres. Ses collègues étaient tous partis sauf un, mais après un certain temps, il avait décidé de lui-même de plonger dans les bras de morphée et Angel ne pouvait le blâmer pour ça. Lui-même avait hésitait à partir à la suite de ce qu’avait énoncé Lian, mais non. Le médecin avait toujours le cul posé sur un tabouret de bar à siroter un alcool sans vraiment le vouloir. Très patient, le brunet ne comprenait pas pourquoi il perdait son temps ainsi. Se relevant, il quitta le club sans se retourner après avoir payé, les mains dans les poches de son manteau. L’heure tardive faisait que plus beaucoup de monde traînait dans les rues, mais comme si le destin continuait de lui jouer de mauvais tours, il fallait qu’Angel croise pile la route de la blondinette. Il avait suffi d’un regard levé pour en rencontrer un autre. Retenant un énième soupir, il s’approcha de la demoiselle qui semblait vouloir la fuir. Cependant, il ne la retenait pas par un geste, ses mains restant au chaud à leur place, mais par ses paroles.
— Accepte un rendez-vous.
Il savait qu’il venait de faire mouche. Pourquoi ? Parce qu’elle s’était arrêtée. Parce qu’elle ne comprend certainement pas pourquoi il balançait si haut un possible rencard avec la jeune femme d’un seul coup. Pourquoi il était resté et pourquoi il continuait après la querelle qu’ils venaient de traverser il y a peu de temps. Se rapprochant donc d’un pas, amoindrissant la distance entre eux deux, Angel baissa légèrement la tête pour rencontrer des iris sombres et il reprit la parole avant même que son interlocutrice ne le fasse. Lian parlait trop. Beaucoup trop.
— Tu ne m’aime pas. Tu aimes une image de moi. Tu aimes le médecin qui sauve ton père, pas moi. N’essaie même pas d’affirmer ou d’infirmer, Lian. Les preuves sont là.
Le médecin parlait de la façon qu’avait eue Lian à son encontre. De l’envoyer paître après le baiser échangé, le plaçant dans le même panier que tout mecs aspirant à simplement déshabiller la danseuse pour une nuit et non pour qui il était vraiment. Certes, son geste inhabituel portait à confusion, mais maintenant qu’il avait eu le droit à un coup de tonnerre de la blonde, il ne pouvait plus croire un seul battement de cœur, un seul morceau de vérité de sa part lorsqu’elle disait avoir des sentiments pour lui. Ses yeux ne mentaient pas, ses dires non plus. Incroyablement franc, Angel ne lésinait pas sur son ton catégorique et froid. La colère avait largement parlé, mais cela n’excusait pas tout. D’hommes qui l’accompagnaient, elle croyait forcément que c’était ses amis. D’un comportement qu’ils adoptaient, elle pensait qu’il avait le même. De ce fait, les apparences avaient pris le dessus sur tout le reste et ceci, le brunet ne pouvait laisser passer. Une bonne fois pour toute, pour la première fois, il prenait les devants avec elle. Même si ce n’était pas de la façon dont elle l’espérait.
— Un rencard, un seul. Pour que tu me découvres moi et non le médecin et que je te découvre toi et pas la danseuse de ce soir. Oui ou non ?
C’était évident qu’il accepterait le refus, son visage l’exprimait clairement. Par contre, le jeune homme restait évasif sur le rendez-vous en question et c’était bien la le but. Soit elle lui faisait confiance et disait oui pour savoir où tout cela allait les mener, soit elle disait non et leur route se séparait définitivement. Parce que Lian savait qu’Angel ne reviendrait pas vers elle. Elle savait qu’une fois le lendemain arrivé, il n’existera plus rien. Il ne dira que le nécessaire sur son père, mais ne sera plus celui qui la soignera. Parce qu’ils n’auront plus aucun lien. Si elle disait oui alors, tous deux s’embarquaient dans une aventure à l’aveugle. Même le brunet ne savait pas à quoi s’en tenir, même lui n’était pas prêt à imaginer un futur construit. Non pour le moment, il n’attendait qu’une réponse.
— Si tu te demandes quand, je dirais que cela dépend de nos emplois du temps. Où ? Loin de l’hôpital et loin d’ici. Afin que personne ne nous reconnaisse et qu’on ne soit que tous les deux. Ton numéro, je l’ai déjà avec le dossier médical de ton père.
En somme, s’ils avaient vraiment l’intention d’avoir un rendez-vous tous les deux alors, le médecin pourrait simplement lui envoyer un message et convenir avec elle des détails. Parce que Lian ne savait pas qu’Angel était pliable. Ne se prenant jamais la tête, si elle désirait aller à tel endroit, il dirait oui sans sourciller. Par contre, il sera intransigeant sur l’horaire et ses patients passeront en premier et vue les activités nocturnes de la jeune femme, ils allaient devoir caser un moment pour eux. Pour se voir réellement. Sans artifice et c’était l’occasion rêver d’en apprendre plus sur lui. Parce qu’elle ne savait rien de sa personne et c’était bien l’objectif d’Angel, que la danseuse sache une partie de son histoire et de sa personnalité et qu’elle se rende compte de ses véritables sentiments pour lui. L’attirance entre eux était flagrante, mais est-ce plus que cela ? Pas du point de vue du médecin et il allait parfaitement le démontrer à sa partenaire.
vocivus
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Re: les exigences du coeur + Angel Mar 14 Avr - 22:04
Quand elle était retournée en salle, Lian avait remarqué que le groupe était parti. Plus d'Angel, plus de médecins pervers qui la regardaient comme un morceau de viande. Soulagée, elle ne pensa pas à regarder près du bar, ne vit pas les deux irréductibles qui buvaient à l'autre bout du club. Elle se remit à danser, à faire le show, à sourire. Au fil des minutes, elle retournait dans son personnage et c'était comme si rien n'était arrivé, comme si c'était une soirée comme les autres.
Il ne restait plus grand monde à la fin de son service et elle laissa la fermeture à une autre danseuse. Ses billets en main, elle les refila au garde pour qu'il les ajoute dans sa caisse puis elle retourna dans sa loge pour se changer. Arrachant sa robe avec soulagement, elle la troqua contre un jeans et un pull en laine crème, ses cheveux relevés en chignon en attendant d'être lavés pour refaire ses tresses. Puis elle sorti dans la rue et glissait sa main dans sa poche pour prendre ses clés de voiture quand une silhouette accrocha son regard.
Angel.
Instantanément, son visage se ferma en croisant ses yeux. Il était resté. L'avait-il regardée ? Avait-il bavé devant le spectacle ? Sentant la nausée monter dans sa gorge, elle se détourna pour se diriger vers le parking, maudissant ses pieds qui s'arrêtèrent d'eux-même en entendant la proposition du médecin. Un rendez-vous ? Se retournant, elle lui lança un regard furieux, prête à l'invectiver. Mais il ne lui en laissa pas le temps et elle du l'écouter, bras croisés sur sa poitrine vibrante de colère.
Ne me reproches pas ça, Angel, c'est toi qui as toujours refusé de t'ouvrir. Enfin, avant de me voir en robe.
Il était près, beaucoup trop. Malgré la vigueur qu'elle avait mise dans ses gestes pour se démaquiller, elle avait toujours le goût de ses lèvres sur les siennes, leur sensation. Et elle avait beau être en colère, elle avait envie de l'embrasser et fixait ses lèvres avec un mélange de désir et de rage. Réalisant son geste, elle releva les yeux vers ceux d'Angel qui revenait à la charge. Il faisait le premier geste, cette fois, lui proposait un rencard, voulait qu'ils apprennent à se connaître. Avant ce soir, elle aurait accepté sans hésiter, sans réfléchir, aurait sauté sur l'occasion, mais là...
Ses lèvres closes, elle ne répondait pas, incapable de choisir quelle syllabe sortir. Oui ou non. Choix simple, le plus simple du monde, et pourtant... Un soupir lui échappa quand il reprit la parole. Il était décidé, il était sérieux. Mais il ne lui laissait qu'une chance, c'était écrit sur son visage. Si elle disait non, ce serait fini. Rompant le contact, elle recula d'un pas en secouant la tête, son regard fixé au sol. Puis elle murmura :
Je ne travaille pas les lundis et les mercredis. Et j'ai toujours rêvé d'un pique-nique en amoureux dans un temple, la vue y est magnifique.
Paupières serrées, elle se tu quelques secondes avant de relever les yeux vers Angel, le visage à nouveau fermé.
Ne me fais pas attendre, doc, j'ai été assez patiente comme ça.
Puis, sans attendre sa réponse, elle se retourna et s'éloigna, rejoignant sa voiture pour rentrer chez elle, guettant déjà le texto de celui qu'elle attendait depuis si longtemps.